Biais cognitifs – L’effet de halo
Dernière mise à jour : 28 mars 2023
Ce texte fait partie d’une série portant sur les biais cognitifs.
Personne ne veut vraiment l’admettre, mais beaucoup de nos décisions d’embauche sont prises sur la base de sentiments généraux ou de perceptions sommaires lors de l’entrevue.
Que nous soyons séduits par l’aura social ou le physique attrayant d’un candidat ou, à l’inverse, repoussés par un élément de sa personnalité ou de son apparence, il est étonnamment facile de prendre des décisions d’embauche qui n’ont rien à voir avec la question de savoir si ce candidat sera ou non performant dans son travail.
Si vous avez déjà été influencé(e) dans votre jugement et incité(e) à embaucher une personne candidate ou à rejeter sa candidature sur la base d’une seule caractéristique, vous avez peut-être été victime de l’effet de halo. Il s’agit d’un type de préjugé inconscient qui brouille notre perception exacte des autres et nous amène à faire une fixation sur un seul trait de leur caractère ou de leur physique, positif ou négatif.
L’effet de halo se manifeste souvent au cours du processus de recrutement. Lorsque nous sommes pressés par le temps et que nous devons sélectionner la bonne candidature pour un poste à pourvoir, nous pouvons être tentés de nous appuyer sur l’impression produite par une personne candidate ou sur certains traits de sa personnalité ou de son apparence pour accélérer notre prise de décision.
Description du phénomène
Le terme effet de halo a été proposé par le psychologue Edward Thorndike pour décrire la manière dont les gens se persuadent inconsciemment d’aimer les autres. ll désigne certains des facteurs qui influencent la façon dont nous jugeons tous d’autrui.
Le phénomène se produit lorsque vous faites automatiquement des hypothèses ou portez des jugements favorables sur les gens en vous basant sur un élément positif de leur profil qui a attiré votre attention. En réalité, vous ne savez pas grand-chose de ces personnes, mais vous leur attribuez inconsciemment une « auréole » parce que vous les trouvez sympathiques.
Il s’agit d’une distorsion de la perception (ou biais cognitif) qui influe sur la manière dont nous interprétons les informations concernant un individu dont nous nous sommes formé une image positive.
Manifestations en contexte de recrutement
Dans un contexte de recrutement, l’effet de halo se traduit par la tendance à laisser les qualités d’une personne interrogée, ou du moins celles que l’on peut percevoir, effacer la perception d’aspects moins intéressants de sa candidature.
En d’autres mots, ce biais cognitif influence la façon dont se construit le jugement porté sur une personne sur la base d’une perception positive de celle-ci. Les recruteurs en viennent ainsi à embaucher des candidats qu’ils apprécient et à passer outre le fait qu’ils n’ont pas toutes les compétences requises pour le poste.
Un exemple courant de l’effet de halo est l’attirance physique et la tendance à attribuer des qualités positives à une personne séduisante. Par exemple, en voyant une personne physiquement belle, on peut supposer qu’elle est généreuse, intelligente ou digne de confiance. Ce biais est si courant que l’effet de halo est parfois décrit comme la tendance à croire que « ce qui est beau est bon ».
L’effet de corne, aussi appelé « effet de halo inversé » ou « effet de halo négatif », est l’opposé de l’effet de halo. Au cours du processus de recrutement, il amène les recruteurs ou les responsables de l’embauche à garder une mauvaise impression d’une personne candidate sur la base d’une caractéristique singulière, souvent physique.
La perception de ce qui constitue un trait négatif, souvent motivée par des stéréotypes nuisibles et le conditionnement social, peut conduire quelqu’un à supposer, par exemple, qu’une personne débraillée est négligente, qu’une personne en surpoids est paresseuse ou qu’une personne ayant un accent particulier n’est pas intelligente.
Stratégies pour éviter de faire dérailler vos entrevues
Trouver, attirer et recruter les meilleurs talents n’est pas chose aisée. Lorsqu’il s’agit de présélectionner des candidatures, les organisations ont rarement le temps ou les ressources nécessaires pour bien connaître les candidats, rassembler et analyser toutes les informations pertinentes sur eux, et prendre des décisions raisonnées ou objectives.
Au lieu de cela, les gestionnaires des ressources humaines s’appuient souvent sur des biais cognitifs, notamment l’effet de halo et l’effet de corne, pour prendre des décisions rapides sur les personnes à embaucher et à ne pas embaucher.
Comment alors contrer ces biais ?
Soyez d’abord conscient(e) de vos propres préjugés avant de commencer l’entrevue.
Au terme de celle-ci, n’attribuez pas de qualités à une personne candidate sur la base d’une perception générale ou d’une première impression positive.
Faites des entrevues à l’aveugle. Une entrevue téléphonique (sans interface vidéo) permet d’éviter le piège de la personne séduisante ou attirante. À ce sujet, lisez l’extrait ci-dessous sur l’effet qu’a eu l’introduction des entrevues à l’aveugle dans les orchestres américains.
Enfin, diversifiez les intervieweurs, de sorte que la première et la deuxième entrevue ne soient pas menées par la même personne. Lorsqu’il est question d’éviter les biais cognitifs, deux têtes valent certainement mieux qu’une !
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Extrait d’une étude menée à Harvard :
« Les difficultés associées […] à la lutte contre la discrimination fondée sur le sexe dans les processus d’embauche ont représenté un défi majeur pour les décideurs politiques au cours des dernières décennies. Pour tenter de remédier à cette discrimination, la grande majorité des orchestres symphoniques ont revu leurs pratiques de recrutement à partir des années 1950. De nombreux orchestres ont ouvert leur processus de recrutement à un éventail de candidats, au lieu de n’engager que des musiciens triés sur le volet par le chef d’orchestre. À la suite de ces changements, la plupart des orchestres engagent aujourd’hui de nouveaux musiciens après environ trois séries d’auditions en direct ou enregistrées : préliminaires, semi-finales et finales. En outre, dans le cadre de ces révisions, un certain nombre d’orchestres ont adopté des auditions “à l’aveugle”, au cours desquelles des écrans sont utilisés pour dissimuler au jury l’identité et le sexe du musicien. Dans les années qui ont suivi ces changements, le pourcentage de musiciennes dans les cinq orchestres les mieux classés [aux États-Unis] est passé de 6 % en 1970 à 21 % en 1993. »
Goldin, C., & Rouse, C. (2000). Orchestrating Impartiality: The Impact of "Blind" Auditions on Female Musicians. The American Economic Review, 90(4), 715-741.
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